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L’année 2021

2021

DERNIERS ESPOIRS

4 janvier. La justice britannique refuse la demande d’extradition d’Assange vers les États-Unis pour raison de santé et un « risque très élevé de suicide », après deux ans d’alertes, dont celles d’un collectif de plus de 300 médecins 69, et le constat du psychiatre qui l’a examiné.

Mais la juge Vanessa Baraitser déclare Assange coupable de toutes les charges et rejette les arguments de la défense en faveur de la liberté d’expression et d’information au motif qu’avec les révélations de WikiLeaks, « il est allé au-delà du rôle lié au journalisme d’investigation ».

Il est donc jugé « non extradable » pour cause de santé mentale incompatible avec les conditions de détention dans une prison « Supermax » aux États-Unis et sa libération est ordonnée.

Le Mexique offre l’asile politique à Assange.

6 janvier. La remise en liberté d’Assange est refusée, la juge Baraitser arguant que les États-Unis ont annoncé qu’ils feraient appel. Il est donc maintenu en détention à Belmarsh, une prison « Supermax » version britannique.Ses défenseurs comparent son traitement à celui d’Augusto Pinochet, assigné à résidence dans une luxueuse clinique après son arrestation à Londres en 1998 70.

7 janvier. Le Congrès des États-Unis confirme l’élection de Joseph Biden.

19 janvier. Dans une vidéo publiée sur Twitter, Stella Moris demande au président sortant Donald Trump d’accorder une grâce de « dernière minute » : « M. le Président, Julian est en prison en ce moment, il pourrait y mourir. C’est peut-être là sa seule chance ». En 2016, Trump avait effectivement proposé à Assange de le gracier s’il donnait le nom de sa source dans l’affaire des courriels fuités d’Hillary Clinton 71. Trump, qui a déjà quitté la Maison Blanche, ne graciera pas Assange mais soixante-treize autres personnalités, dont son ancien conseiller Steve Bannon, accusé de détournement de fonds 72.

12 février. Conformément à ce que le nouveau président des États-Unis Joseph Biden avait annoncé le 20 janvier lors de son investiture, son gouvernement fait officiellement appel, dans la continuité de la politique de son prédécesseur, du refus de la justice britannique d’extrader Assange afin de le juger dans le cadre de l’Espionage Act.

Votée en 1917, cette loi vise à faire taire toute forme d’opposition à une guerre menée par les États-Unis. Parmi les personnes condamnées au titre de l’Espionage Act, on compte notamment : Eugene Debs, Victor L. Berger, Ethel et Julius Rosenberg, Daniel Ellsberg, Chelsea Manning, Daniel Hale, Edward Snowden et Reality Winner.

28 mars. Assange reçoit un message personnel de soutien du pape François.

26 juin. L’un des principaux témoins à charge d’Assange, l’ex-activiste islandais Sigurdur Ingi Thordarson, revient sur ses accusations 73. Ce porte-parole autoproclamé de WikiLeaks, qui s’était proposé en 2010 de participer à une récolte de fonds, aurait détourné plus de 50 000 dollars ; puis il a été accusé, entre autres d’escroqueries, de divers délits, dont l’abus sexuel sur mineurs. En mai 2019, c’est Kellen S. Dwyer, adjoint du procureur général William Barr nommé par Donald Trump, qui a proposé à Thordarson l’immunité contre un faux témoignage incriminant Assange.

Edward Snowden tweete : « C’est la fin du procès contre Julian Assange. »

Juillet. L’Équateur révoque formellement la nationalité d’Assange.

11 août. En duplex depuis sa prison, Assange est auditionné dans le cadre de l’appel des États-Unis pour son extradition. Les États-Unis s’attaquent aux évaluations psychologiques pour relativiser le risque de suicide. La justice britannique permet aux États-Unis de faire appel sur le risque de suicide.

27-28 octobre. Audiences en appel, liées à la demande d’extradition des États-Unis. Washington conteste l’expertise psychologique qui avait établi qu’Assange encourrait un risque de suicide s’il était envoyé outre-Atlantique dans une prison de très haute sécurité et présente des « garanties » à la justice britannique quant au bon traitement qui lui serait réservé.

On apprendra plus tard qu’Assange a subi un « micro-AVC » (accident ischémique transitoire) le 27 octobre à cause du stress.

10 décembre. La Haute Cour du Royaume-Uni donne raison aux États-Unis et approuve désormais l’extradition.

Edward Snowden tweete : « Julian Assange est l’un des plus anciens prisonniers politiques du monde occidental. À tous les niveaux, l’affaire transpire la corruption et la procédure abusive. Certains justifient la situation en récitant des mèmes pour faire la démonstration de leur allégeance. C’est de la dystopie. »

13 décembre. En France, à l’initiative du député non-inscrit Cédric Villani, Hacking Justice est projeté à l’Assemblée nationale où se prépare une proposition de résolution pour « inviter le Gouvernement à accorder l’asile politique à Julian Assange ». Elle est portée par une cinquantaine de députés issus de tous les groupes parlementaires.


69. Lire également « Mettre fin à la torture et à la négligence… », supra, p. 64.
70. Lire Elizabeth Vos, « Le pouvoir contre la presse : les cas d’extradition de Pinochet et d’Assange », Les Crises, 26 octobre 2019.
71. Lire « Trump a offert de gracier Assange contre la source de WikiLeaks en 2016 », Challenges (avec Reuters), 18 septembre 2020.
72. Lire « Donald Trump accorde la grâce à l’un de ses anciens conseillers, Steve Bannon, et 72 autres personnalités », Le Monde (avec AP et Reuters), 20 janvier 2021.
73. Lire « Un témoin-clé dans l’affaire Assange admet avoir menti dans l’acte d’accusation », Les Crises, 20 juillet 2021.


Avec l’aimable autorisation de l’auteur © Hacking Justice (Livre + Film en téléchargement)